22/04/2008
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Les biocarburants : réservoirs pleins et assiettes vides ? Les déclarations se multiplient pour condamner les biocarburants
Les faits sont réels. Le monde a connu ces derniers jours des émeutes de gens qui n'avaient plus les moyens de se nourrir, et il y a eu des morts. Des émeutes qui étaient d'une ampleur totalement inattendue, puisqu'on les a vu surgir d'un coup dans plusieurs régions de la planète. Notamment, en Haïti, au Cameroun, en Egypte et aux Philippines. Avant tout, même si nous vivons dans un système économique mondialisé, nous voudrions faire remarquer que ce sont des pays où les biocarburants sont quasi-inexistants. Considérons ensuite les plantes qui servent majoritairement à fabriquer des biocarburants. Ce sont la canne à sucre au Brésil, le maïs aux Etats-Unis, le palmier à huile en Indonésie, la betterave sucrière et le colza en Europe. Alors que les plantes dont le prix a le plus augmenté récemment sont le blé et le riz... Le blé était ambivalent. On a cultivé du blé pour fabriquer de l'éthanol, mais tout le monde doit le savoir, on a arrêté. Cela s'est fait sans aucune intervention politique, et cela n'a pas fait la une des journaux, alors beaucoup l'ignorent mais la filière biocarburant n'a qu'une obsession : être compétitif face au pétrole. On ne fera plus d'éthanol à partir du blé parce que cette matière première est devenue trop chère. Ce qui nous ramène au premier problème, pourquoi le blé a t-il tant augmenté ? Et le riz ?
Certains disent que c'est du fait de la réduction des surfaces agricoles disponibles pour les cultures alimentaires, puisque tant de terres servent maintenant aux cultures énergétiques. L'argument n'est que partiellement vrai. A t-on déjà oublié toutes les terres d'Indonésie prises sur la forêt vierge ? Les terrains qui en Europe étaient il y a quelques années encore en jachère, avant qu'elles ne servent pour les biocarburants ? On peut néanmoins considérer l'argument comme à moitié vrai. La pression exercée par la demande de biocarburants est l'une des causes de la hausse du prix du blé et du riz, mais elle n'est pas unique. Loin de là. Les chinois sont plus riches, ils mangent plus. Alors que leurs terres cultivables seraient plutôt en réduction du fait des constructions innombrables de routes, d'usines, et d'immeubles de toute sorte partout dans le pays. Dans une moindre mesure, ces caractéristiques décrivent aussi la situation de l'Inde. Et en sus de la consommation de nourriture qui s'accroit, il faut aussi compter avec une modification des types de nourriture consommée, avec notamment une hausse de la part de viande. On ne peut pas comparer les valeurs nutritives d'un kilo de céréales avec celles d'un kilo de viande, mais il aura fallu bien plus qu'un kilo de céréales pour nourrir le bétail qui aura fourni ledit kilo de viande.
Il faut aussi compter avec le pétrole. Les tracteurs roulent au gazole, et les produits fertilisants viennent de l'industrie chimique. Si le pétrole augmente, mécaniquement, le prix du blé augmente. Un prix du blé qui est normalement fixé l'offre et la demande, mais la donne a changé ces dernières années. Dans les années 1990, la surproduction dans les pays riches aboutissait à des dons massifs de grains aux pays pauvres. Aujourd'hui, les choses sont mieux contrôlées, et il n'y a plus de surproductions en Europe. Alors qu'il y a des acheteurs qui paniquent, et qui achètent plus qu'ils n'ont besoin, pour porter encore plus les prix à la hausse... On accuse les biocarburants, c'est vite dit ! Cela fait des paroles fracassantes qui passent bien dans les médias, mais qui masquent une réalité beaucoup plus complexe, telle qu'il est extremement difficile de l'appréhender dans sa globalité. Alors qu'il est si facile d'accuser la bagnole, en fermant les yeux sur les millions de tonnes de tabac cultivées chaque année. On taira tout aussi pudiquement les affaires des paysans afghans qui préfèrent planter du pavot plutôt que des pommes de terre. Mais on ne peut manquer d'évoquer que s'il y a famine en Haïti, il faut donner une part de responsabilité à la situation politique désastreuse qu'a connu ce pays, dans ces 20 dernières années. C'est très réducteur de faire porter la responsabilité de la faiblesse du pouvoir d'achat des haïtiens aux biocarburants... Et comment se fait-il qu'un bon paysan français qui plante du blé, obtienne un rendement de 8 tonnes à l'hectare, quand le paysan éthiopien n'en obtiendra qu'une tonne pour cette même surface ?
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