Le délit de fuite est un acte en hausse continue depuis des années ; en effet «Si le conducteur est sous l'emprise de l'alcool ou sans permis, il va sûrement partir après la collision», explique Chantal Perrichon, présidente de la Ligue contre la violence routière. De plus, la fuite est la deuxième cause de délit après la consommation d'alcool. C’est donc un acte assez fréquent, mais qui comporte de nombreux risques.
Mieux comprendre le délit de fuite
La notion de délit de fuite donne lieu à pas mal de confusion. Contrairement à ce que l’on peut croire, un délit de fuite est reproché à une personne cherchant à échapper à ses responsabilités civiles et pénales en quittant les lieux d’un accident, il ne s’agit en aucun cas d’un refus d’obtempérer face à un agent de police.
Le délit de fuite est réglementé par l’article L231-1 du code de la route, qui reprend les articles 434-10 et 434-45 du code pénal. C’est le fait, « pour le conducteur d'un véhicule quelconque, de ne pas s'arrêter, sachant qu'il vient de causer ou d'occasionner un accident ». En d’autre terme, il est question de délit de fuite lorsque vous savez que vous êtes la cause ou l’origine d’un accident et que vous prenez volontairement la fuite dans le but de cacher quelque chose. De plus, sous le terme « véhicule » sont désignés les automobiles, les motos, ainsi que les vélos, tricycles à moteur, etc.
Ensuite il faut savoir qu’il peut s’agir d’un accident minime ou même d’un accrochage, d’un accident matériel etc. Le délit de fuite n’est pas réservé aux accidents graves. En effet, on se persuade facilement qu'infliger un petit accrochage quelconque d'un véhicule en stationnement ou autre, est sans conséquence, mais si vous ne vous identifiez pas, cela est considéré, tout de même, comme un délit de fuite.
Les conducteurs qui, en pareil cas, se dépêchent de quitter les lieux en douce, ne sont pas rares. Le délit de fuite ne concerne donc pas seulement les accidents avec de graves dégâts matériels ou des blessés. Un accrochage même léger et sans gravité, peut valoir d'être poursuivi pour ce motif, si on a été surpris ou dénoncé.
Mais ce n’est pas tout :
- Un simple arrêt sur les lieux ne suffit pas à être disculpé. En effet, le responsable doit aussi communiquer ses coordonnées exactes permettant de l’identifier (arrêt de la Cour de cassation du 27 janvier 2009).
- Concernant un accrochage lors d’un créneau, il s’agit d’un délit tout autant constitué, dans le cas où le responsable n’a, là aussi, pas laissé ses coordonnées (Cour de Cassation du 16 janvier 2007).
- L’absence de dégâts sur le véhicule de la partie adverse n’est pas une raison valable pour quitter les lieux sans communiquer son identité et pourra être assimilée à un délit de fuite.
- Enfin, dans le cas où le constat n’a été établi qu’après la plainte de la victime, on considère quand même que le responsable a fait un délit de fuite (Cour de Cassation du 7 mai 2008).
De plus, les juges peuvent accepter certains arguments démontrant la bonne foi du conducteur poursuivi :
- Il faut savoir que le fait de quitter les lieux ne caractérise pas suffisamment l’infraction, si le conducteur à des raisons valides, il pourra ne pas être condamné pour ce délit. Comme par exemple, partir pour aller chercher les secours, ainsi la personne ne cherche pas intentionnellement à fuir ses devoirs de responsabilités, mais de porter du soutien à la victime.
- Si les conducteurs se connaissent, il n’y a pas délit de fuite puisqu’on ne peut pas lui reprocher d’avoir fui pour ne pas être identifié.
- Un arrangement à l’amiable avec échange d’identité entre conducteurs ne pourra pas être interprété comme un délit de fuite.
- Enfin, on ne considère pas comme étant un délit de fuite le fait de refuser de remplir un constat amiable d’accident si l’identité de la personne responsable est connue d’une autre manière.
Victime d’un délit de fuite : La marche à suivre
Si vous avez été ou que vous êtes victime d’un préjudice causé par un automobiliste non identifié, il ne faut pas attendre pour réagir. Tout d’abord, dès que vous aurez remarqué l’anomalie sur votre véhicule, essayez de mener une enquête personnelle, de poser des questions aux personnes habitants aux alentours, ou encore à des passants qui auraient pu voir la scène et par conséquent qui auraient pu relever le numéro d’immatriculation de la voiture responsable, ou tout simplement sa marque, son modèle, sa couleur etc…
Par la suite, vous devez impérativement, dans les jours qui suivent le préjudice, réaliser une démarche en trois points :
- Il faut vous rendre au commissariat de police afin de déposer plainte auprès des forces de l’ordre, en leur faisant part de tous les éléments d’identification du responsable, à défaut il s’agira d’une plainte contre « X », et elle n’aura que peu de chance d’aboutir. Ne pas oublier de conserver la décharge de dépôt de plainte, qu’il faudra joindre au dossier de demande d’indemnisation.
- Ensuite, il vous faudra rédiger seul le constat amiable, en y exposant les éléments dont vous avez connaissance, et le descriptif des dégâts causés. Si vous n’avez pas vu la scène, essayez d’indiquer la façon la plus probable dont l’accident s’est passé.
- Enfin, ilvous faudra déclarer le sinistre à votre assureur. Vous devrez transmettre par courrier recommandé sous 5 jours, un ensemble de pièces justificatives à votre assurance ; il s’agit de la même procédure que pour la déclaration d’un sinistre classique.
Le commissariat refuse votre dépôt de plainte ?
Dans de nombreux cas la police peut refuser d’enregistrer votre plainte, et vous recommandera de déposer une main courante au lieu de déposer plainte, or une main courante n’a aucun des effets de la plainte lors d’un délit de fuite.
Mais il faut savoir qu’un policier n’a pas le droit de refuser d’enregistrer une plainte. En effet, selon le Code de Procédure pénale, Article 15-3 : « La police judiciaire est tenue de recevoir les plaintes déposées par les victimes d'infractions à la loi pénale et de les transmettre, le cas échéant, au service ou à l'unité de police judiciaire territorialement compétent.
Tout dépôt de plainte fait l'objet d'un procès-verbal et donne lieu à la délivrance immédiate d'un récépissé à la victime, qui mentionne les délais de prescription de l'action publique définis aux articles 7 à 9 ainsi que la possibilité d'interrompre le délai de prescription par le dépôt d'une plainte avec constitution de partie civile, en application de l'article 85. Si elle en fait la demande, une copie du procès-verbal lui est immédiatement remise. »
Par conséquent si un policier refuse le dépôt de votre plainte, n’hésitez pas à lui rappeler cette Article.
Dans la circonstance où il y a toujours un rejet de la part du commissariat, et que vous avez connaissance de l’identité du responsable du délit de fuite (numéro d’immatriculation, nom ou numéro d’assurance …), vous pouvez déposer plainte par courrier recommandé avec accusé de réception au Procureur de la République de votre département, en expliquant les faits de manière très détaillée. Voici un exemple de lettre RAR pour porter plainte qui a permis de résoudre le litige d’une personne dont le responsable niait les faits avant d’être convoqué suite à un dépôt de plainte par courrier alors que plusieurs commissariats lui ont refusé sa plainte.
Serez-vous indemnisé ?
Il existe deux cas de figures différents :
- Tout d’abord le cas où, le conducteur fautif est identifié grâce à sa place d’immatriculation ou autres : dans un premier temps, la police cherchera à contacter la personne qui vous a heurté.
- Soit elle la trouve et par conséquent lui rappelle les sanctions liées à un délit de fuite et donc l’assurance de la personne responsable vous remboursera en totalité les sommes dues.
- Soit le conducteur adverse fait le mort ou nie les faits, alors la police devra enquêter (convocation de l'adversaire avec le véhicule en question...). Si l'enquête n'aboutit pas, on considèrera que le responsable n’a pas été reconnu.
- Maintenant, le cas où le conducteur fautif n’a pas été identifié :
- Si votre véhicule est couvert par une assurance tous risques, dans ce cas, l’ensemble des dommages occasionnés (matériels ou corporels) seront indemnisés par votre assurance. Voici un exemple de lettre pour une demande d’indemnisation à votre assurance. Cependant, ces indemnisations peuvent être limitées en ce qui concerne les dégâts matériels par rapport au plafond fixé dans votre contrat, ou peuvent être accompagnées de franchises.
- Si votre véhicule est couvert par une assurance au tiers, votre assurance ne pourra rien faire pour vous, même si vous n’êtes pas le fautif. Il vous faudra alors faire une demande d’indemnisation auprès du Fonds de garantie pour les assurances dommages obligatoires (FGAO), ce dernier intervient pour prendre en charge les dommages matériels et corporels. Tandis que les assurés « tous risques » pourront eux, profiter de leur garantie « dommage collisions » ou « dommage tous accidents » afin de trouver réparation.
Que faire en cas de dommages corporels ? Si vous avez eu des blessures corporelles, vous avez à votre disposition toutes les démarches à suivre en cliquant sur ce lien.
Accusé à tort de délit de fuite, que faire ?
Dans le cas où vous êtes accusé à tort d’avoir commis un délit de fuite, il vous faudra envoyer une lettre de contestation à la compagnie d’assurance qui vous met en cause et vous accuse de délit de fuite ; en la mettant en demeure de fournir toutes preuves vous impliquant dans l’infraction, comme par exemple des témoignages, ou encore la preuve de votre présence sur les lieux etc.
Puis la deuxième chose à faire est de réunir tous les éléments appropriés, les témoignages et preuves selon lesquels vous n’aviez pas prêté votre voiture ce jour-là et que vous n’étiez pas sur les lieux le jour et à l’heure incriminée. En effet, il faut démentir votre implication dans l’accident en question.
Si cela ne suffit pas, vous pouvez faire appel à un expert, qui devrait prouver que votre voiture n’était pas impliquée dans le sinistre.
Enfin, vous pouvez en dernier recours, porter plainte pour diffamation contre l’assurance qui vous accuse et contre leur assuré.
Quelles sanctions encourez-vous si vous commettez un délit de fuite ?
Les conséquences pénales
Il s’agit de sanctions très lourdes, c’est le juge du tribunal correctionnel qui va fixer la peine qui correspond selon la gravité du sinistre, et de s’il s’agit d’un délit de fuite simple, ou aggravé avec des dommages corporels par exemple. La peine encourue peut aller :
- Jusqu’à 75 000 € d’amende et 3 ans d’emprisonnement, en effet selon l’article 434-10 du code pénal, « Le fait, pour tout conducteur d'un véhicule ou engin terrestre, fluvial ou maritime, sachant qu'il vient de causer ou d'occasionner un accident, de ne pas s'arrêter et de tenter ainsi d'échapper à la responsabilité pénale ou civile qu'il peut avoir encourue, est puni de trois ans d'emprisonnement et de 75 000 € d'amende. » ;
- Retrait de 6 points sur le permis de conduire;
- Annulation du permis pendant 3 ans minimum ; en effet selon l’article 434-45 du code pénal, « Les personnes physiques coupables du délit prévu par l’article 434-10 encourent également la suspension, pour une durée de cinq ans au plus, du permis de conduire, cette suspension ne pouvant pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle. » ;
- Obligation d’accomplir un stage de sensibilisation à la sécurité routière ;
- Confiscation du véhicule utilisé pour commettre le délit de fuite ;
- Versement de dommages et intérêts aux victimes de l’accident.
Toutes ces peines seront proportionnelles à la gravité des faits.
Les conséquences sur l’assurance automobile
Il faut savoir qu’au-delà des condamnations pénales, l’assurance va elle aussi prendre des mesures. En effet, la fuite du conducteur coupable explique son mauvais usage de la route et donc, un niveau de risque plus élevé. Selon les circonstances du sinistre et du niveau des dégâts occasionnés, il y a deux situations plausibles :
- Le doublement du montant de la prime, soit une majoration allant jusqu’à 100% de la prime d’assurance. Il s’agit de la sanction la plus couramment prise ;
- Mais dans le cas d’un sinistre plus grave avec des dommages corporels, cela vaudra la résiliation sans sommation du contrat, obligeant le conducteur à trouver une nouvelle compagnie d’assurance tout en étant fiché comme « résilié » à l’AGIRA (Association pour la gestion des informations sur le risque automobile).
Nos conseils
S’arrêter après un accident ne suffira pas à vous disculper, il faut absolument que vous laissiez vos coordonnées à l’autre conducteur impliqué, ou que vous laissiez un mot permettant de vous identifier.
En effet, penser partir sans vous identifier peut s’avérer être une mauvaise idée car un témoin ou une caméra peut vous avoir repéré et les forces de l’ordre auront vos coordonnées. Alors il sera trop tard et vous ne pourrez plus nier les faits.
Pour résumer, un délit de fuite risque de vous valoir bien plus de malus que si vous prenez en charge vos responsabilités.
Michel G
Le 21 juin 2019 en scooter j'ai été renversé par une camionnette venant de ma gauche, et n'ayant pas respecté le "Laisser passer". Un témoin a relevé l'immatriculation de l'adversaire. Le témoin et moi avons déposé une plainte. J'ai été fortement blessé, 3 hospitalisations, le scooter est détruit. J'ai été remboursé des frais médicaux par mon assurance.
Le parquet a transmis le dossier à la police, service accident, depuis je n'ai plus de nouvelle.
Que faire, après un an et demi?
Maintenant, je connais, après une recherche, le nom et l'adresse de l'adversaire, mais je ne me suis pas encore manifesté envers lui.
Merci de m'aider pour récupérer les indemnités qui me reviennent.